René a rencontré Jésus.
En 1971, je fais connaissance de René. Avec sa femme Adèle et leurs enfants, ce sont les seuls baptisés de ce village sénoufo. Le soir, devant la porte de leur maison, est assise une troupe d’enfants accourus pour écouter les histoires de la Bible, que raconte avec beaucoup de conviction, René, au visage rieur.
C’est durant sa formation en école d’agriculture que René a fait la connaissance de Jésus.
Depuis, grande est sa foi en son Seigneur ! Tout lui est occasion de le louer et de le faire connaître !
Pourtant les menaces ne manquent pas de la part des villageois :
« René, ne mets pas tes enfants à l’école sans avoir offert les sacrifices coutumiers ! » « René, la coutume de notre village t’interdit de commencer une culture nouvelle ! » Pourtant René met ses enfants à l’école, plante l’oignon dans la terre de ses ancêtres… jusqu’au jour où les villageois inscriront leurs enfants à l’école, cultiveront l’oignon qui se vend si bien sur le marché !
La petite graine est devenue un bel arbre !
25 ans plus tard, j’ai la joie de participer à la bénédiction de la chapelle construite par 50 baptisés !
Les noms des villages présents ce jour-là sont chantés dans une litanie d’action de grâces pendant la procession menant à la porte de la chapelle. Nous demandons au Seigneur d’ouvrir sa maison. Chacun a sa place : les femmes en uniforme, les enfants, les hommes, les joueurs d’instruments, la chorale des jeunes avec en mains, des queues, (comme le veut la tradition) balancées au même rythme, voulant rappeler qu’ici, se trouve le Maître.
Joseph, fils aîné de René, explique que nous allons planter la croix en terre sénoufo. La croix est apportée au pas de danse par deux jeunes qui chantent : « Le bois de la croix, c’est le bois de notre foi ». Et la croix de s’approcher de chacun comme pour l’inviter à faire un acte de foi personnel.
C’est au tour de la lumière de prendre possession des lieux, avec le cierge pascal introduit par deux hommes qui chantent: « L’obscurité régnait dans le monde et la lumière est venue par Jésus sorti de chez Dieu ». Avec un pas de danse, c’est la Parole de Dieu qui est portée par deux jeunes filles, puis ce sont les offrandes par des enfants et finalement la Vierge apportée par deux femmes.
Rien ne se fait sans la prière :
A la fin de la célébration est venu le temps de parler à cœur ouvert. René est le premier à s’exprimer : « Oh non ! Je n’ai pas une plus grande foi que vous. Mais je vous le dis, rien ne se fait sans la prière. Regardez Jésus, s’il n’est pas tombé en tentation, c’est qu’il priait sans cesse, de nuit comme de jour…Je suis très heureux aujourd’hui qu’il y ait des baptisés à Famberla, mais il faut aller dans les villages qui ne connaissent pas encore Jésus !»
Nous avions tous dansé autour de l’autel. La femme de René, Adèle (amputée d’une jambe à cause de la lèpre), nous avait suivis du regard. Nous étions à peine revenus à nos places qu’elle fait signe aux instrumentistes de se remettre à jouer, et prenant sa béquille, se met à virevolter sous les yeux émerveillés de tous !
Nous sommes en 2017 et je me souviens ! Je me rappelle un stage de première communion où Emile, dernier fils de René et Adèle, chantait avec conviction : « Je suis la lumière du monde, celui qui vient avec moi, ne marchera pas dans la ténèbre, mais il aura la lumière de la Vie ! » Aujourd’hui, Emile est prêtre !
Sr Nicole Robion