Sœur Maria Cimperman est religieuse du Sacré-Cœur de Jésus. Elle a participé à la première assemblée du synode sur la synodalité en octobre 2023 à Rome. A la lumière des questions que nous lui avons posées, Sr Maria offre à nos lecteurs et lectrices quelques perspectives particulières sur l’Assemblée synodale 2023.
« Je suis reconnaissante de l’occasion qui m’est donnée de partager ces réflexions avec vous, d’autant que j’ai conscience que la méthodologie
utilisée lors de votre Chapitre général de 2023 était celle de la Conversation dans l’Esprit (CDE). J’imagine que votre chapitre général
a été votre expérience synodale ».
Qu’est-ce qui a fait de la « conversation dans l’esprit » (CDE) un outil si puissant au cours de l’expérience synodale ?
Tout d’abord, la CDE a été un grand facteur d’égalité. Dans le processus, lors du premier et du deuxième tour, chaque personne disposait du
même temps de parole et d’écoute. Un même temps était offert au cardinal ou à l’étudiant, aux femmes et aux hommes. Il y avait une
pause entre les prises de parole, afin que les paroles de chacun puissent atteindre profondément les auditeurs. La manière dont les personnes
ont choisi qu’on s’adresse à elles a été une expérience très touchante.
À chaque table, les présentations consistaient à demander le nom de la personne, son lieu d’origine et la manière dont elle souhaitait que l’on
s’adresse à elle. À une exception près, chaque personne a demandé aux autres de l’appeler par son prénom.
Deuxièmement, la CDE invite chaque personne à faire silence plutôt qu’à parler. Cela permet à l’Esprit d’imprégner plus profondément
l’écoute. Ainsi au troisième tour, lorsque le partage était ouvert, il y avait un silence après 5 ou 6 commentaires.
Troisièmement, la CDE a proposé et enseigné une méthode communautaire de discernement. Tout le monde ne discerne pas de la même manière, et le discernement communautaire est un domaine en plein essor pour beaucoup dans notre Eglise. Cette méthode peut être utilisée N’IMPORTE OÙ. Nous devons l’enseigner et l’offrir davantage dans nos églises locales.
Quatrièmement, la présence d’un facilitateur à chaque table pendant le Synode, a permis aux autres membres de la table d’être plus détendus
vis à vis du nouveau processus. Pour moi, la facilitation a été essentielle pour que le travail de ce Synode puisse avoir lieu. Nous (facilitateurs)
avons contribué à créer un espace de discernement. À certains moments, le facilitateur invitait les personnes à s’exprimer, notamment celles qui n’avaient pas encore parlé.
Cinquièmement, la CDE a permis l’intimité et la vulnérabilité. Selon mon expérience, c’est après le partage des deux premiers tours que la
vulnérabilité et la prise de risque grandissaient. L’écoute respectueuse et sensible a créé une atmosphère dans laquelle quelqu’un pouvait
partager une peur jusqu’alors indicible, un autre pouvait partager un espoir profond, voire désespéré, des gens de sa paroisse. Plus on a
partagé de manière vulnérable, plus le processus de discernement s’est approfondi. La conversation dans l’esprit est, à mon avis, l’un des éléments fondamentaux pour créer un espace de transformation en chacun, entre les membres de la table et dans l’ensemble du groupe.
Quels sont, pour vous, les signes que l’Esprit est et a été le protagoniste du chemin synodal ?
Pour moi, un signe clé du Synode fut de trouver un moyen d’aller de l’avant, au-delà de la polarisation et des divisions. Je dois admettre que jusqu’à ce que je le dise, je n’avais pas réalisé à quel point j’avais besoin de le voir. Nous avons été en mesure de supporter les tensions qui accompagnent les conversations lorsque les gens ont des points de vue très différents
« parce que nous nous reconnaissions comme sœurs et frères ».
Nous nous sommes respectés les uns les autres, même si nous avions des perspectives différentes. Voir cela est magnifique et
riche d’espérance ! Cela laisse penser que nous pouvons le faire dans d’autres endroits, dans nos pays, dans notre église.
Un autre signe est la transformation dont j’ai été témoin. J’ai entendu des personnes parler de leur transformation intérieure, changement
d’état d’esprit et de cœur qui surprenaient même la personne qui en parlait.
Un troisième exemple est que certaines des interventions des théologiens et des membres votants du Synode sont arrivées exactement au bon moment. Par exemple, le théologien Ormond Rush a proposé une brève réflexion théologique sur la signification de la tradition, en établissant un lien entre les appels passés et présents. L’opportunité de cette présentation était stupéfiante.
Un dernier signe de l’Esprit a été pour moi la patience des membres de l’Assemblée. Nous nous engagions sur un nouveau terrain dans ce
Synode, et à certains moments, il y a eu quelques incidents de parcours, par exemple en ce qui concerne la technologie et l’emploi du temps.
Les gens ne se sont pas plaints, mais ont fait preuve de patience. De la part de 400 personnes, au cours d’une réunion d’un mois, c’était
exemplaire !
Comment décririez-vous votre travail avec et pour l’UISG ?
Mon ministère principal est celui de coordinatrice de la Synodalité à l’UISG (Union internationale des Supérieures générales). Participer et
répondre aux processus du Synode depuis 2021 a été une part de ce travail au service de la vie religieuse. A juste titre, cela a occupé une
grande partie de mon temps au cours du semestre d’automne.
Une deuxième composante du service de Coordinatrice de la Synodalité consiste à accompagner les membres de l’UISG dans la réalisation de
leur engagement pris lors de l’Assemblée Plénière de 2022. Chacune s’est engagée
« à vivre une synodalité vulnérable dans le service de leader, en l’animant au sein de la communauté, en collaboration avec le peuple de Dieu ».
Une autre partie de mon ministère consiste à coordonner, avec une équipe, le projet « Femmes Religieuses Théologiennes ». Des théologiennes religieuses du monde entier âgées de moins de 60 ans se réunissent dans ce cadre pour construire des réseaux entre les sœurs et
pour que davantage de générations répondent à l’appel de la théologie au service de la vie religieuse en pleine évolution.
En conclusion, et c’est peut-être le plus important, j’écris ici pour remercier les SMNDA du don de vivre la communauté parmi vous, à
Rome. C’est un don pour lequel je suis très reconnaissante !