Sœur Maria Carmen Ocón Moreno, Sœur Rehema Toiwoki Kimesera, Sr Angela Kapitingana et Sr Maria Julia Alonso Martinez
Partage de Sœur Rehema Toiwoki Kimesera et Sœur Maria Carmen Ocón Moreno
Nous avons le plaisir de vous annoncer que l’ouverture officielle de la communauté de Ouarzazate a eu lieu le dimanche 14 juillet. La cérémonie s’est déroulée dans la seule église existante, Sainte Thérèse, qui est attenante à la maison des sœurs.
La célébration eucharistique était présidée par le Cardinal Cristóbal López Romero et, curieusement, c’était la première fois depuis que nous sommes ici qu’il n’y avait pas d’autres personnes que les sœurs, en l’occurrence notre responsable de congrégation, Sr Angela Kapitingana ; Sr Maria Julia Alonso Martinez représentant l’équipe de leaders de NOUA et nous-mêmes. C’était probablement un signe de la façon dont nous sommes appelées à vivre notre présence missionnaire dans ce lieu, avec discrétion et simplicité, mais avec une grande profondeur : la célébration a vraiment été un moment de foi intense pour chacune d’entre nous.
La Parole de Dieu nous a guidées à travers la vocation du prophète Amos (7,12-15) et le rappel de notre appel par le Seigneur « avant la fondation du monde », afin que dans ce lieu nous soyons « saintes et sans tache à ses yeux dans l’amour » (Ephésiens 1,3-14) ; nous sommes envoyées avec la puissance de son Esprit pour réaliser ici la mission qu’il nous a confiée à travers la Congrégation après nous avoir donné les recommandations nécessaires (Marc 6,7-13).
Le cardinal Cristóbal a souligné que notre mission ici est d’offrir à la population une présence et un témoignage du Christ. Nous sommes ici pour insérer notre charisme dans le diocèse de Rabat et plus particulièrement à Ouarzazate. Il a choisi un extrait du livre d’Eloi Leclerc « Sagesse d’un pauvre », pages 138-139, à propos de la mission d’évangélisation :
“Commençons par quelque chose. Mais par où commencer ? La chose la plus urgente, répondit François, est de désirer avoir l’esprit du Seigneur. Lui seul peut nous rendre bons, foncièrement bons, d’une bonté qui ne fait qu’un avec notre être le plus profond. Le Seigneur nous a envoyés évangéliser les hommes. Mais as-tu déjà réfléchi à ce que ce que veut dire évangéliser ? Evangéliser un homme, vois-tu, c’est lui dire : Toi aussi, tu es aimé de Dieu dans le Seigneur Jésus. Et pas seulement le lui dire, mais le penser réellement. Et pas seulement le penser, mais se comporter avec cet homme de telle manière qu’il sente et découvre qu’il y a en lui quelque chose de sauvé, quelque chose de plus grand et de plus noble que ce qu’il pensait, et qu’il s’éveille ainsi à une nouvelle conscience de soi. C’est cela, lui annoncer la Bonne Nouvelle. Tu ne peux le faire qu’en lui offrant ton amitié, une amitié réelle, désintéressée, sans condescendance, faite de confiance et d’estime profonde ».
La signature du protocole d’accord entre le diocèse de Rabat et notre Congrégation, ainsi que les mots de conclusion de Sœur Angela, dont voici quelques extraits, ont été un autre temps fort de la cérémonie :
« Nous sommes, certes, peu nombreuses, mais l’histoire nous a montré à maintes reprises que même un petit groupe, uni par un objectif commun et animé par la foi, peut porter un profond témoignage. Au début de notre congrégation, une petite poignée de huit femmes ont osé être missionnaires. Aujourd’hui, leur courage et leur dévouement nous inspire pour entamer ce nouveau chemin à Ouarzazate.
L’ouverture de cette communauté est un témoignage de notre foi inébranlable et de notre engagement à vivre la synodalité au quotidien. Notre mission s’étend à chaque cœur que nous touchons et à chaque vie que nous rencontrons. Nous sommes appelées à être présentes, à écouter et à agir. Nous sommes appelés à être les mains et les pieds du Christ dans un monde qui aspire à la compassion. Puissions -nous accomplir cette mission avec joie et détermination, sachant que notre force réside dans notre unité et notre foi. « Nous sommes mission » et notre présence ici aujourd’hui est un témoignage de l’amour transformateur du Seigneur Ressuscité qui nous appelle à cheminer ensemble, en élargissant l’espace de notre tente ».
Depuis notre arrivée le 12 juin, nous avons ressenti de multiples façons l’amour du Seigneur Ressuscité qui nous a certainement précédées. Nous avons été très touchées par l’accueil chaleureux de la population locale. Quelques jours plus tard, nous avons été accueillies par nos voisins pour célébrer la fête du Sacrifice « Eid al-Adha ». On nous a généreusement offert du thé marocain, des gâteaux traditionnels, des noix et un délicieux pain fait-maison, accompagné de brochettes d’agneau rôti. Ce fut un moment de partage entre femmes, permettant de connaître leurs inquiétudes concernant le manque d’emploi formel, l’augmentation du coût de la vie, le taux élevé de divorces mais aussi un temps de goûter la joie d’être ensemble, d’apprendre à se connaître, d’offrir une hospitalité sincère et de proposer l’aide dont nous pourrions avoir besoin.
Les invitations se sont poursuivies les jours suivants, dans la famille de l’homme qui travaillait de temps en temps pour la paroisse en arrosant le jardin quand il n’y avait personne, dans la maison de la présidente du groupe de couture des femmes initié par Thérèse, la laïque française qui, avec Daniel son mari, a maintenu l’activité de la mission ces quatre dernières années. Un autre jour, une amie des sœurs FMM (qui étaient ici) est venue apporter un énorme couscous. Tous ces moments ont été précieux pour connaître les gens et le contexte, mais aussi pour expérimenter combien la présence chrétienne a été appréciée et respectée par eux. Chaque fois que nous nous présentions comme les sœurs vivant à la « kanisa » (l’église), les gens se réjouissaient et beaucoup évoquaient les bons moments vécus avec les sœurs dans le passé.
Très vite, nous avons commencé à prendre des cours de « darija » (dialecte arabe local) avec Mme Khadija, qui non seulement nous enseigne la langue mais nous initie également à la culture locale qui est principalement « amazigh ». Dès que nous nous lançons dans des conversations sur la cuisine, elle nous donne des conseils pour préparer les plats locaux et sur les endroits où acheter les produits nécessaires.
Malgré la chaleur de l’été qui réduit considérablement la présence des touristes dans la région, nous avons également eu un bon nombre de visiteurs étrangers à l’église, certains venant juste pour voir les lieux tandis que d’autres venaient pour les services du dimanche. La plupart d’entre eux ne s’attendaient pas à trouver une église dans cet endroit reculé et encore moins à y trouver des femmes religieuses. Ce qui nous a frappées, c’est qu’à deux reprises, des personnes différentes sont venues d’abord nous saluer, puis, avant de repartir, elles sont revenues pour prier ou simplement pour saluer. Ces personnes n’étaient pas catholiques, mais appartenaient à d’autres églises chrétiennes, et elles ont dit qu’elles avaient beaucoup apprécié les rencontres que nous avions eues.
Une autre visite significative pour nous a été celle de Hassan. Cet homme âgé nous a raconté qu’il avait étudié dans cette mission, en 1946, lorsqu’il y avait une petite école, tenue par les sœurs. Il nous a parlé d’un prêtre, le Père Augustin, qui l’a aidé en écrivant une lettre de recommandation pour qu’il puisse poursuivre des études de comptabilité, ce qui lui a permis de gagner sa vie jusqu’à sa retraite. Même s’il vivait à Marrakech, il n’a jamais oublié ses origines et il vient souvent à Ouarzazate. Il nous a dit que chaque fois qu’il passe près de l’église, il est ému aux larmes, car il ne peut pas oublier que c’est dans ce lieu que sa vie a changé.
Nous avons été vraiment bénies d’être témoins, au début de notre présence ici, des fruits de la mission vécue par ceux(celles) qui nous ont précédées. Une petite graine plantée il y a bien longtemps, qui a certainement produit beaucoup de fruits.
Nous espérons pouvoir continuer à faire reconnaître ce signe du Royaume de Dieu parmi nous et à le développer à travers l’incarnation de notre charisme SMNDA.