Interview à Sœur Magdalena Orczykowska, Sœur Missionnaire de Notre-Dame d’Afrique. Originaire de Pologne, elle travaille actuellement en Ouganda en Afrique de l’Est.
Comment as-tu rencontré les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique ?
Tout a commencé lorsqu’un des prêtres de ma paroisse se préparait à partir en mission en Afrique. J’étais en deuxième année de collège lorsqu’après la messe, au cours de laquelle ce prêtre avait parlé de ses préparatifs, une pensée m’est soudain venue à l’esprit : « Tu seras missionnaire en Afrique ». J’ai été surprise car je n’y avais jamais pensé auparavant. J’avais toujours voulu avoir un mari et beaucoup d’enfants, donc la seule option pour concilier cela avec le fait d’aller en mission, c’était de trouver un mari pour y aller avec moi ou de trouver un mari en Afrique. Mais j’avais abandonné ces projets, sans trop y penser jusqu’à mon bac. Après celui-ci, j’ai fait un pèlerinage à pied à Częstochowa, un lieu de dévotion mariale en Pologne. Parfois, les pèlerins se trouvent dans des « zones de silence » lorsque tout le monde marche silencieusement pendant un certain temps. C’était le troisième jour du pèlerinage, consacré aux missions et aux vocations, lorsqu’en marchant dans cette « zone de silence », j’ai vu un voile de religieuse devant moi et une question s’est imposée à moi : « Pourquoi pas toi ? ». J’étais stupéfaite : « Moi, une religieuse ? » Je n’y avais jamais pensé ! Ce jour-là, tout était question de vocation : chansons, sermons, lecture, etc. Je ne pouvais pas cacher mes larmes jusqu’à ce que finalement, pendant la messe, je dise au Seigneur : « D’accord, je te dis oui, mais guide-moi, parce que je n’ai aucune idée du type de congrégation où j’irai, ni de la façon de devenir religieuse ! »
Au retour du pèlerinage, j’ai rapidement cherché sur Internet une congrégation missionnaire à Lublin, car je savais déjà à ce moment-là que j’y étudierais. Les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique sont apparues les premières dans le navigateur. Mais j’attendais un signe et il est venu rapidement. Pendant la retraite des étudiants de première année à l’université, divers groupes de l’aumônerie universitaire encourageaient d’autres personnes à se joindre à eux et un de ces groupes était un groupe missionnaire. Ils chantaient magnifiquement en différentes langues, vêtus de costumes colorés. J’ai pensé que ce serait bien si j’appartenais à ce groupe. J’ai été surprise d’apprendre que ce groupe était animé par les Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique (Sœurs Blanches), une congrégation que j’avais déjà recherchée sur Internet. C’est ainsi que pendant les cinq années de mes études, j’ai appris à connaître la congrégation et les sœurs, et j’ai été confirmée dans ma vocation. En 2012, j’ai demandé à y entrer, puis j’ai fait un postulat de deux ans en Pologne, le noviciat au Burkina Faso et j’ai prononcé mes premiers vœux.
Que signifie pour toi être missionnaire ?
Un(e) missionnaire est une personne qui est appelée et envoyée pour proclamer l’amour de Dieu pour chaque personne, pour rendre Dieu proche de tous ceux et celles que nous rencontrons chaque jour. Tous les baptisés sont appelés à être missionnaires, et parmi eux le Seigneur choisit ceux et celles qu’il envoie à l’étranger, sur différents continents, dans des lieux où Jésus est encore inconnu, où d’autres ne peuvent ou ne veulent pas aller. Chaque missionnaire, lorsqu’il va dans un pays différent et rencontre une culture différente, une mentalité différente, doit être ouvert et prêt à apprendre, à recevoir ce que les personnes auxquelles il/elle est envoyé(e) ont à offrir. En tant que missionnaire, je me laisse évangéliser par les personnes auxquelles je suis envoyée, des personnes qui n’ont peut-être pas beaucoup de biens matériels mais qui sont riches en esprit.
Tu es une soeur missionnaire en Ouganda. Qu’admires-tu dans la culture locale, les gens, et quel est ton défi ?
Ce que j’admire chez les Baganda parmi lesquels je travaille, c’est un esprit de gratitude dans presque toutes les conversations. Dans les salutations, il y a beaucoup de remerciements pour le travail accompli. Après le repas, bien sûr, nous remercions la personne qui l’a préparé, puis nous entendons sa réponse : « Merci d’avoir mangé », car certains refusent.
Quand je reviens de l’école, où je travaille comme enseignante, plus qu’un simple : « Merci pour votre travail », j’entends : « Merci d’avoir enseigné aux enfants ! »
Après la messe où je chante dans la chorale, souvent les gens me remercient d’avoir chanté. Avec les gens avec qui je passe du temps, j’ai appris à remercier pour des moments pour lesquels je n’avais jamais éprouvé un tel besoin auparavant. Mon cœur et mes yeux se sont ouverts à la grandeur et à la bonté infinie de notre Dieu. Une autre chose que j’admire chez les gens du coin, c’est leur générosité et leur solidarité. À l’occasion d’un mariage, d’un décès d’un membre de la famille ou dans d’autres circonstances difficiles, les gens se rassemblent pour soutenir un voisin, un paroissien ou un membre de la chorale et, lorsque c’est possible, ils partagent de leur argent, même une somme la plus modeste.
Une chose qui me pose toujours problème, c’est l’un des aspects des salutations. Lorsqu’ils saluent, les femmes et les enfants s’agenouillent pour exprimer leur respect envers les personnes âgées, l’homme, le prêtre ou la religieuse. Aujourd’hui encore, je me sens très mal à l’aise lorsque quelqu’un s’agenouille devant moi pour me saluer ou lorsqu’une femme plus âgée que moi se lève pour me donner un siège ou m’apporter une chaise.
Quel est le visage de l’Église en Ouganda ?
L’Ouganda est un pays chrétien à 85 %, dont 43 % de catholiques. Les premiers missionnaires arrivés ici en 1879, ce sont les Pères Blancs. Le peuple ougandais est très fier d’eux et aime beaucoup les missionnaires. En témoigne le processus de béatification des premiers missionnaires français, qui a été entamé à la demande des fidèles ougandais. L’Église en Ouganda est une Église qui fait une grande place à la musique. Dans presque toutes les paroisses, les messes dominicales ont leur chorale qui aide les fidèles à prier. Les gens n’ont pas honte de leur foi, de nombreux catholiques portent le chapelet autour du cou en signe de dévouement au Seigneur et à la Vierge. La vie religieuse est très riche ici : beaucoup de congrégations féminines locales aux nombreuses vocations. L’un des défis de l’Église en Ouganda, c’est le petit nombre de prêtres. Nous avons encore des diocèses et des coins reculés du pays où les fidèles ne peuvent pas assister à la messe du dimanche chaque semaine.
Que pouvons-nous te souhaiter ?
Que chaque jour, je devienne de plus en plus semblable à Jésus-Christ et que je sois un instrument entre ses mains au service de ceux à qui il m’envoie !
Interviewée par Sœur Anna Wójcik