Avant la fête de Notre-Dame d’Afrique, le 30 avril, nous nous souvenons de l’histoire de la statue qui se trouve dans la basilique d’Alger, une histoire qui commence en 1840.
Le 5 février 1840, Mgr Dupuch, premier évêque d’Alger depuis 1839, se rend en France pour trouver des prêtres et des ressources pour son nouveau diocèse. Arrivé à Paris, il rend visite aux Sœurs du Sacré-Cœur à Villeurbanne et y voit la statue de la Vierge Fidèle, realisée par Edme Bouchardon le sculpteur du roi Louis XV.
Mgr Dupuch fut immédiatement conquis et demanda une copie.

En juillet 1907, les Sœurs du Sacré-Cœur sont expulsées et s’exilent en Belgique. La propriété de Villeurbanne est divisée en lots. En 1937, les Pères Blancs purent acheter le lot comprenant la chapelle et en firent leur procure.
Une copie de la statue fut réalisée grâce au moule qui existait encore et, le 5 mai, elle fut remise à l’évêque pour qu’il l’emporte à Alger.
C’est cette statue qui portera plus tard le nom de Notre-Dame d’Afrique.
La statue est d’abord placée sur la terrasse de l’évêché, puis, en 1843, elle est prêtée aux trappistes de Staouéli qui la placent au-dessus de la porte de leur monastère.


En 1846, Mgr Pavy succède à Mgr Dupuch. Après la définition du dogme de l’Immaculée Conception le 8 décembre 1854, Mgr Pavy décide de construire une grande église de pèlerinage à Notre-Dame et récupère la statue des Trappistes.
Le 20 septembre 1857 « Notre-Dame d’Afrique », est installée dans une chapelle provisoire à côté de ce qui sera la Basilique Notre-Dame d’Afrique.
Les travaux de la basilique débutent le 27 février 1858.
Le 14 novembre 1866, Mgr Pavy décède.
Son successeur, Mgr Lavigerie, achève la construction de l’église qu’il consacre le 2 juillet 1872. Le 4 mai de l’année suivante, il installe la statue de Notre-Dame d’Afrique dans le nouveau sanctuaire.
Au printemps de 1873, les Pères Blancs prirent possession de l’église considérée comme le berceau de la Société. Aujourd’hui ce sont encore les Missionnaires d’Afrique qui y assurent le ministère.
En 1876, le Pape Pie IX donne au sanctuaire le titre de basilique, et Mgr Lavigerie couronne la statue.
A partir de ce jour, l’église Notre-Dame d’Afrique devient une basilique.

Le journal de Notre-Dame d’Afrique donne des informations sur son habit

Le 8 août 1885, une dame de Blida propose de faire confectionner à ses frais une robe pour Notre-Dame.
Les Pères Blancs acceptèrent avec reconnaissance et demandèrent à la bienfaitrice de faire exécuter ses pieux projets par les Carmélites.
Le 19 décembre, le même journal rapporte qu’une « souscription a été ouverte pour l’achat d’une robe pour Notre-Dame… ». Il s’agit sans doute de compléter le don de la première bienfaitrice.
Le 29 avril 1886, on apprend que « 22 ex-voto ont été déposés dans la sacristie de Notre-Dame d’Afrique dans le courant du mois d’avril, sans compter la riche robe de la Vierge, brodée par les carmélites de Bugeaud (cité d’Alger) et due aux dons d’un grand nombre de fidèles ».
D’après une photographie en noir et blanc publiée en 1914, cette robe était de couleur très claire, constellée de motifs hexagonaux brodés, comme des flocons de neige, de la taille de la paume d’une grande main. Au centre, à hauteur de la poitrine, se trouvait un cerf, également brodé.
En 1925, Sœur Marie Claver (Odette Grandin de l’Eprevier, nièce de Mère Marie Claver) a confectionné une nouvelle robe.
En 1950, Sœur Emmeran (Yvonne Menjou-Marcat) des Franciscaines Missionnaires de Marie, a brodé une nouvelle robe et un manteau. Le 30 avril, jour de la fête de la Vierge, la statue a été revêtue de son nouveau costume.
Une nouvelle prise d’habit a eu lieu le 7 décembre 1985, en présence du cardinal Duval. Les matériaux avaient été offerts par des bienfaiteurs et grâce à un don très généreux, le travail a pu être confié à un maître brodeur de Tlemcen, M. Sekkal.
Voici une citation de Sœur Germaine-Marie (Marguerite Laporte) des Sœurs de Notre-Dame d’Afrique :
« La broderie a été réalisée selon la technique traditionnelle du “medjdoub”, également utilisée en France sous le nom de “guipé”…
Les motifs, des plus importants aux tiges les plus fines, sont découpés dans du cuir fin par le maître brodeur, qui les dispose et les colle sur le velours avant de le confier aux brodeuses.
Ces dernières recouvrent les motifs de fils d’or qui ne pénètrent pas dans le tissu. A l’intérieur, un fil de lin tire les fils d’or et les fixe de part et d’autre du cuir. D’où le nom de « Medjoub » qui vient du mot arabe signifiant « tirer ».
Plusieurs de nos sœurs ont participé à la préparation et au suivi de ce travail qui a duré trois mois.
Ainsi parée du beau travail d’un artisan du pays, la Vierge bénit le peuple qui la vénère, debout sur son piédestal en céramique, également réalisé par un artiste algérien, M. Boumehdi ».


L’auvent recouvrant la statue a été enlevé en 2007 car il était sur le point de s’effondrer.
Il s’est avéré que l’inscription : « Notre-Dame d’Afrique, priez pour nous et pour les musulmans » est désormais visible sous tous les angles.

Notre-Dame d’Afrique, sur les hauteurs d’Alger, regarde la mer et veille sur tous ceux qui passent d’une rive à l’autre de la Méditerranée, ce carrefour où les civilisations se rencontrent, d’ouest en est, entre l’Orient et l’Occident, et du sud au nord, entre l’Afrique et l’Europe.
Les bénédictions de Notre-Dame d’Afrique s’étendent aussi, nous en sommes sûrs, à toute l’Afrique et à toutes ces femmes et tous ces hommes qui, tout en appartenant à une multitude de communautés, forment partout une seule grande famille, remplissant la fonction qui leur est assignée et apportant leur part à la tâche commune en faveur de l’Afrique.

Extrait d’un article de René Xavier LAMEY Archiviste des Pères Blancs (+1993) 30 avril 1989
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