Tanja Klein Jung, notre coordinatrice en Allemagne, a rendu visite à la communauté de Karlsruhe. Elle partage ses impressions sur une journée marquée par la solidarité, l’humanité et l’engagement auprès des réfugiés.
Une communauté solidaire à Karlsruhe
En mars, j’ai eu l’opportunité de rendre visite à Sœur Kordula et Sœur Chantal à la Maison Lavigerie, située à Karlsruhe. Toutes deux font partie d’une communauté dynamique avec les Pères Blancs, engagée avec cœur et détermination dans l’aide aux réfugiés. Elles accompagnent, soutiennent, écoutent – elles sont présentes pour ceux qui ont tout perdu.
Je travaille avec les Sœurs depuis plusieurs années, mais je m’étais souvent demandé à quoi ressemblait leur quotidien à Karlsruhe. Que signifie concrètement soutenir des personnes en situation précaire ? Ces questions me hantaient depuis longtemps. J’ai enfin eu l’occasion d’accompagner Sœur Kordula pendant un après-midi dans son travail.
Une rencontre marquante : Anne, réfugiée à Karlsruhe
Ce jour-là, j’ai rencontré Anne, une jeune femme originaire du Burkina Faso. Seule à Karlsruhe, sans nouvelles de sa famille, elle portait dans son regard la peur, la douleur, et une immense tristesse. Son histoire m’a profondément touchée. Elle était silencieuse, prudente, presque fragile.
Et moi ? Je me tenais là, sans voix, me demandant : comment entrer en contact avec une personne ayant vécu autant de souffrances ?
Nous avons marché en silence, puis pris le tramway ensemble. Anne ne parlait que français, et moi, à peine quelques mots. Grâce à une application de traduction sur mobile, nous avons réussi à échanger quelques phrases. Un mot mal traduit a fait naître un sourire sur son visage. Un véritable sourire chaleureux, précieux, qui a illuminé ce moment. Ce fut une preuve que l’humanité peut dépasser toutes les barrières linguistiques.
Visite de la banque alimentaire
Notre destination suivante : la banque alimentaire. Sœur Kordula voulait montrer à Anne le chemin pour qu’elle puisse s’y rendre seule par la suite. Pour moi, c’était une première. Je n’avais jamais eu besoin de ce service, mais ce lieu m’a ouvert les yeux.
J’y ai vu des personnes en situation de précarité, des gens dignes qui luttent dans l’ombre au quotidien. La chaleur des bénévoles était bouleversante. L’un d’eux remplissait le panier d’Anne sans poser de questions sur sa situation financière. Ce geste simple et humain m’a profondément émue.
Nous nous sommes ensuite arrêtées devant une armoire métallique – l’une des nombreuses à Karlsruhe. Ces armoires solidaires sont régulièrement remplies de denrées alimentaires par des bénévoles et parfois des restaurants. C’est un réseau d’aide discret mais efficace, tissé par la compassion et la solidarité.
Un accompagnement essentiel pour reconstruire une vie
En fin de journée, nous avons raccompagné Anne à son foyer, situé près de l’hôpital. Sa chambre était simple : un lit, une table, une chaise. Les sanitaires et la cuisine étaient communs. Un endroit austère, mais sûr. Elle nous a fait confiance en nous ouvrant sa porte, un geste d’une grande force. J’étais bouleversée. Ces heures passées à ses côtés sont gravées en moi. J’y pense encore souvent.
On parle beaucoup des réfugiés dans les médias, mais on entend rarement leurs voix. On ne voit que trop peu les cicatrices invisibles qu’ils portent. Et encore moins, la force qu’ils mobilisent chaque jour pour avancer.
Plus tard, Sœur Kordula m’a expliqué les nombreuses démarches que ces personnes doivent accomplir : papiers administratifs, rendez-vous médicaux, cours de langue… Un parcours du combattant pour commencer une nouvelle vie. Mais ils ne sont pas seuls : des personnes comme elle les soutiennent à chaque étape.
Et je me demande : que deviendrait Anne sans ces personnes-là ?







