« Chaque personne EST une mission dans notre monde, par le fait même qu’elle est dans ce monde. »
Sœur Mia Dombrecht est Sœur Missionnaire de Notre-Dame d’Afrique. Elle échange avec nous sur sa vocation missionnaire; ce que signifie être missionnaire, les joies et défis de la vie missionnaire et la place de Dieu dans son parcours de vie.
1. Sœur Mia, pouvez-vous nous parler de vous?
Je suis arrivée dans notre communauté de Lublin, en Pologne, le 17 septembre 2018, après avoir passé 27 ans dans différents pays d’Afrique en tant que Sœur Missionnaire de Notre-Dame d’Afrique. J’ai commencé à suivre des cours de polonais à l’Université KUL le 1er octobre.
2. Qui est Dieu pour vous?
Dieu est notre créateur et sauveur. Il rêve d’un monde nouveau où tous les peuples vivraient ensemble comme des frères et sœurs d’une même famille humaine et Il nous invite à devenir co-créateurs et collaborateurs avec Lui. Il veut avoir une relation personnelle avec chacun de nous et attend patiemment de se révéler et de se lier d’amitié avec chacune de ses créatures par Jésus. Il a un rêve pour chaque personne et pour nos vies et a le désir de nous communiquer ce rêve. Si nous découvrons le rêve de Dieu pour nos vies et si nous le suivons, alors nous devenons heureux et épanouis.
3. Après avoir passé de nombreuses années à marcher avec le Seigneur et à œuvrer comme missionnaire, qu’avez-vous vu de Dieu? Quelles sont vos convictions essentielles sur Lui, celles en lesquelles vous croyez le plus fermement, le plus profondément et le plus passionnément après toutes ces années?
Nous sommes faits pour lui et nos cœurs ne peuvent être profondément comblés qu’en Lui. Nous aspirons à l’amour et c’est Lui seul qui peut répondre à ce désir, parce qu’il l’a mis en nous.
Une vie accomplie pour un chrétien est une vie semblable à celle du Christ. Plus nous suivons Jésus dans ses attitudes, plus nous serons pleinement vivants. En Jésus, tous les événements de notre vie reçoivent un nouveau sens, les joies comme les peines. L’important est de découvrir le sens caché de tant d’événements que nous ne comprenons pas bien. En Jésus, tout reçoit un nouveau sens parce que Jésus a tout partagé de notre vie par le fait de son incarnation dans notre humanité.
Ce qui est le plus important pour moi en tant que disciple de Jésus, c’est de lui ressembler dans mon ressenti, mes actions, mes paroles, mes réactions et d’adopter peu à peu ce nouveau mode de vie. En tant que missionnaire, alors que j’éprouve l’amour de Jésus pour moi dans ma vie, j’ai le grand désir que d’autres puissent découvrir, eux aussi, son amitié dans leur vie. En découvrant ce rêve du Père de transformer notre humanité en Royaume de Dieu d’amour et de paix, je veux collaborer pour que ce rêve se réalise, là où je suis envoyée par notre congrégation.
4. Pouvez-vous nous dire comment Dieu vous a appelée?
Le désir d’être missionnaire en Afrique est en moi depuis mon enfance. Quand des missionnaires sont venus dans nos salles de classe à l’école pour partager ce qu’ils vivaient dans leurs pays de mission, je me suis dit: quand je serai grande, je ferai ce qu’ils font. Les paroles de Jésus: «Vous recevrez une force, celle de l’Esprit Saint, qui descendra sur vous et vous serez mes témoins à Jérusalem et dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre.» (Actes 1, 8). Ces paroles me sont bien souvent revenues et m’ont brûlé le cœur.
L’appel à devenir religieuse est venu plus tard, après mes études universitaires. Je désirais me marier, mais j’ai découvert l’amour personnel de Jésus pour moi puis, j’ai ressenti profondément l’appel à donner ma vie à Jésus dans la vie religieuse, afin de répondre à son amour pour moi. J’ai découvert les paroles de Dieu pour moi alors qu’il m’avait parlé de façon très personnelle: «Tu comptes beaucoup à mes yeux et je t’aime» (Is. 43: 4).
5. Comment avez-vousrencontré les Sœurs Blanches?
Depuis mon enfance, je savais qu’ellesexistaient et qu’elles travaillaienten Afrique commeles Pères Blancs.
Je les ai rencontrées pour la première fois au Rwanda. Puis, en Belgique, j’ai demandé à mieux les connaître et j’ai commencé ma formation avec elles.
6. Dans quels pays avez-vous travaillé?
J’ai été envoyée au Rwanda, au Burkina-Faso, en Tunisie et en Mauritanie. En tant que leader régionale en Afrique du Nord-Ouest, j’ai vécu en Algérie et j’ai également visité nos communautés au Mali, du Ghana et du Tchad.
7. Qu’est-ce que signifie pour vous « être missionnaire »?
Je vois qu’aujourd’hui ce mot a plusieurs significations. J’aime dire, avec le pape François, que « chaque personne EST une mission dans notre monde, par le fait même qu’elle est dans ce monde ». Chaque mère, père, médecin, enseignant, travailleur… EST une Mission pour notre humanité.
Ensuite, je crois aussi profondément que tout baptisé est missionnaire et est appelé à témoigner du Christ, là où il vit.
Parmi les baptisés, Dieu appelle certains d’entre eux à être des missionnaires «Ad extra». Cela signifie aller à la rencontrede personnes de cultures et de religions différentes pour témoigner de l’Évangile et travailler avec elles pour édifier le Royaume de Dieu dans le monde. C’est notre appel spécial en tant que Sœurs Missionnaires de Notre-Dame d’Afrique (SMNDA).
8. Quelles sont les qualités essentielles d’un bon missionnaire et comment les croyants peuvent-ils cultiver ces qualités?
Nous ne pouvons recevoir ces qualités que par la grâce de Dieu et dans la prière,en contemplant Jésus, notre modèle. Je prie pour que tous les missionnaires reçoivent la grâce de l’amour universel pour les gens à qui nous sommes envoyés. Seul l’amour peut toucher leurs cœurs.
Je demande aussi la grâce de la foi et de la prière. Sans la grâce de Jésus travaillant en nous, nous ne pouvons rien faire.
En tant que missionnaires, nous voulons suivre Jésus et sortir pour rencontrer l’humanité par son incarnation. Une autre qualité importante pour un missionnaire est de savoir faire un pas vers les autres, parfois différents de nous, afin de les rencontrer et de construire, à travers ces relations, un monde nouveau selon le rêve de Dieu.
Ensuite, comme nous l’a enseigné notre fondateur, le Cardinal Lavigerie, il est important d’apprendre la langue des gens, d’aimer et de respecter leurs valeurs culturelles, leur nourriture…
Le don de pouvoir vivre ensemble tout en faisant l’expérience de la richesse des différences entre nous. Aimer et respecter les autres façons de faire, de se comporter, de travailler…
Mais toutes ces qualités sont le fruit de toute une vie!
9. Quel est le meilleur pont pour l’approche de l’Evangile en Mauritanie / Algérie?
Pour moi, c’est la conviction profonde que le Royaume de Dieu est beaucoup plus large que la communauté chrétienne et l’Église. Nous ne demandons pas aux musulmans de devenir chrétiens. Mais nous souhaitons travailler ensemble dans la vie quotidienne afin de réaliser quelque chose de ce monde nouveau où les gens vivront ensemble dans l’amour et le respect mutuel.
Dans ces pays musulmans, le pont pour l’approche de l’Évangile c’est le témoignage de l’amour, en particulier envers les pauvres. Par exemple, en Mauritanie, Caritas – le service social de l’Église catholique- est la plus grande ONG du pays et 99% des employés sont musulmans. Lorsque l’évêque leur parle, il les appelle «ses collaborateurs». Merveilleux, n’est-ce pas?
10. Quelle a été la plus grande joie de votre vie missionnaire?
Savoir que j’ai suivi l’appel de Dieu dans ma vie et en faire l’expérience jour après jour, grâce à la confirmation que je reçois à travers mon amitié avec les peuples africains des différents pays où j’ai été envoyée. Faire l’expérience de la fidélité de Dieu envers moi au cours de ma vie et constater que cette joie grandit avec le temps.
11. Quelques défis?
Suivre Christ comme Celui qui est envoyé par le Père et accepter d’être envoyée, à tout moment, par la congrégation, là où il y a un besoin – et ceci, encore et encore; quitter les pays où on me connaissait et où je connaissais les gens et leur langue et recommencer dans un nouveau pays, une nouvelle culture et une nouvelle langue…
12. Quels conseils donneriez-vous à cellesqui pensent à la vie missionnairemais hésitent encore ?
Cherchez quelqu’un, un(e) missionnaire, avec qui parler et qui puisse vous aider à reconnaître l’appel de Dieu dans votre cœur. Ceci très important. Vous serez toujours bien accueillis dans l’une de nos communautés où vous pourrez trouver une sœur avec qui partager. Nous sommes souvent tellement aveugles sur nous-mêmes et sur le travail de Dieu en nous et nous avons besoin de conseils de l’extérieur.
Il ne faut pas rester dans cette incertitude, mais franchir ce pas et essayer! Tant que nous ne sommes pas dans la réalité d’un contexte de mission, nous ne pouvons pas savoir à quoi cela ressemble. Notre imagination fait de chaque difficulté une vraie montagne et nous ne voyons que les difficultés et les interrogations et nous ne vivons pas dans la réalité. Par exemple: est-ce que je vais supporter la chaleur ? Est-ce que je vais aimer la nourriture? Comment vais-je vivre si loin de mon pays natal ? Ce sont souvent des questions que nous nous posons avant de partir mais une fois que nous sommes dans notre pays de mission, nous constatons que ces craintes ont disparu. Donc, mon conseil est le suivant: si vous ressentez un attrait pour la mission en pays lointain, n’hésitez pas, n’attendez pas trop longtemps, mais partez avec la grâce de Dieu et vous verrez à quel point la mission est belle!
13. Et maintenant vous êtes dans un nouveau pays de mission – la Pologne. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette nouvelle mission?
En tant que SMNDA, nous sommes à Lublin depuis 27 ans. L’objectif est de témoigner de notre vie missionnaire auprès des peuples africains dans l’Église locale ici en Pologne; faire aimer l’Afrique et accompagner les jeunes qui veulent être missionnaires soit pour une courte durée, soit pour toute leur vie. On peut dire que nous essayons d’être des ponts entre les cultures et les religions. Je participerai à ce travail avec les autres sœurs de notre communauté SMNDA: Anafrida de Tanzanie, Gosia et Anna de Pologne. Pour l’instant, je commence à apprendre le polonais. Vous pouvez consulter nos activités prévues pour l’année 2018-2019 sur notre site Web et vous pouvez venir ici chez nous à Lublin pour participer à l’une ou plusieurs d’entre elles.
14. Que pouvons-nous vous souhaiter?
Je serais heureuse de recevoir des commentaires ou des réactions de la part de ceux qui lisent mon témoignage et de partager quelque chose avec eux!
Sœur Mia Dombrecht –dombrecht.m@gmail.com