L’expérience de notre sœur Béatrix Dagras
La porte de la chambre 506 de la « Résidence de Bon Secours » à Paris est coutumière de frappes discrètes et inattendues : questions, services sollicités ou rendus, informations… sont autant d’occasions de rencontres amicales, apportant l’agrément de leurs baumes. Même la nuit, il arrive qu’un quidam, plaisantin ou en mal d’insomnie, y tambourine deux ou trois coups rapides. Inutile d’aller ouvrir : le temps de se lever pour voir qui est là, la personne est partie !
Dans notre résidence est né un groupe de réflexion d’initiative paroissiale, pour la lecture du Nouveau Testament. J’y participais avec d’autres résidentes. Cette activité paroissiale cessant, vint la remarque : « On ne connaît pas l’Ancien Testament ! » Le groupe devint alors interne à la résidence, se dénomma « biblique », et il me confia le soin de l’animer… Depuis l’année dernière, le groupe est plongé dans les Prophètes. A chaque rencontre, la Parole de Dieu, humainement située dans sa conjoncture spatio-temporelle d’origine, révèle son potentiel d’actualisation dans notre quotidien personnel et collectif de disciples du Christ, faits pour vivre sa Bonne Nouvelle et en témoigner. Là est le fruit essentiel et finalement le but de nos rencontres.
Par ailleurs, concernant les relations avec les Musulmans, je participe à la vie de trois instances :
- Le Groupe des Foyers Islamo-Chrétiens
Il a été fondé en 1977 par le Père Michel Lelong, Père Blanc. Je participe à leurs rencontres locales, et à celle qui les réunit chaque année au niveau national. J’accompagne des demandes personnelles de préparation au mariage, en recevant les jeunes couples ici au 506, et lors de leurs mariages quand ils veulent sceller leur union devant Dieu, j’interviens, comme chrétienne, en parallèle avec un soufi musulman.
- Le Groupe d’Amitié Islamo-Chrétienne (GAIC)
J’y ai surtout coordonné la Semaine (devenue depuis « les Semaines ») de Rencontres Islamo-Chrétiennes (SeRIC), aux réalisations de plus en plus nombreuses, au fil des années, et donnant lieu ensuite à une réunion nationale des organisateurs. Ce succès perdure, preuve que l’aspiration à une existence paisible dans la convivialité avec autrui, accueilli et reconnu dans la richesse de ses différences, qu’il est heureux de partager en recevant celle des autres, est une réalité vécue « au cœur des masses ».
Dernièrement, avec d’autres anciens coprésidents chrétiens et musulmans, j’ai été interviewée lors d’un enregistrement vidéo, réalisé pour la fête des 30 ans de l’association qui aura lieu le 24 mai prochain.
- Enfin, en mai 2020, je rejoins l’équipe du père Antoine Guggenheim, délégué épiscopal pour les Relations aux Musulmans. Face au prosélytisme déployé dans la capitale, ce prêtre théologien du diocèse de Paris, m’a demandé de participer aux réunions trimestrielles d’un groupe qui réfléchit à cette problématique. Ses six membres ont d’ailleurs produit sur le sujet un petit ouvrage de 140 pages, intitulé : « Une pratique chrétienne de la rencontre avec l’islam et les musulmans » – Edition Parole et Silence – August 2022. Le but est de sensibiliser les fidèles du diocèse à la nécessité d’aborder les croyants de l’islam avec le respect dû à tout être humain, à l’exemple de leur Seigneur. Dans ce travail collégial, ma participation a consisté à rédiger, sur la base de l’expérience de mes rencontres avec divers musulmans, plusieurs points sur l’entièreté de l’extrait du concile de Chalcédoine que j’avais résumés par ces mots : « sans confusion ni séparation« .
Ainsi va la vie dans notre « résidence autonomie« , selon son appellation administrative. L’ambiance y est conviviale et bon nombre de services amicaux et de ports fraternels et discrets de fardeaux les uns des autres, y réalisent autant de pages vivantes de l’Évangile.