De notre sœur Vickness N. Muleya, communité de St. Julien, in Ouagadougou, Burkina Faso
L’exclusion sociale pour cause d’allégations de sorcellerie est une violence faite aux femmes, et le phénomène est toujours d’actualité, surtout sur le plateau Mossi. Plus de cinq cents femmes sont dispersées sur le Plateau Mossi dans des abris ou des habitations précaires dans des zones d’insécurité, parce qu’elles sont accusées d’être des « mangeuses d’âmes ».
Les plus chanceuses sont celles qui sont accueillies au Centre Delwende, un centre d’accueil où j’exerce mon apostolat. Les femmes arrivent dépouillées de tous leurs biens et de leur dignité, battues, blessées, leur maison brûlée, sans pouvoir voire leurs enfants et leur famille. Beaucoup meurent sur la route, d’autres tentent de se suicider. Ces cas sont fréquents et de nombreuses victimes meurent tragiquement sans aucune aide.
En général, ce sont des personnes âgées, et en particulier des femmes, qui sont les premières à porter le chapeau lorsque la mort ou d’autres événements dramatiques surviennent dans une famille. Actuellement, au Centre Delwende, nous avons 178 résidents, dont 7 hommes ; 70% ont plus de 70 ans. Malheureusement, nous accueillons aussi des jeunes – la plus jeune a 43 ans et elle est au centre depuis 4 ans.
Ignorant leurs droits et les dispositions légales existantes, souvent livrées à elles-mêmes par les services compétents, ces femmes sont victimes d’exclusion, d’abus divers et de destruction de leurs biens.
Notre mission est de les accueillir, les loger, les soigner, les nourrir, et de les sensibiliser et de plaider pour leur retour dans leur famille et leur communauté d’origine. En faisant cela, nous essayons de leur redonner vie, en les aidant à reconstruire leur estime de soi et leur confiance. Nous les accompagnons par des soins médicaux et psychiatriques, et des cours d’alphabétisation pour celles qui peuvent encore apprendre. Elles font aussi du jardinage, élèvent des porcs et de la volaille, filent le coton, fabriquent du soumbala et du savon.
Comme les allégations de sorcellerie, les atteintes aux droits et les violences qui en découlent pour les victimes mettent à rude épreuve la cohésion des familles et des communautés dont elles sont issues, nous essayons de rétablir les liens avec leurs familles, en particulier celles qui, par la médiation et la réconciliation, sont ouvertes à accepter et accueillir ces femmes.
Dans cet apostolat, vivre JPIC n’est pas, pour moi, quelque chose de lointain ou d’étranger. Au contraire, cela fait partie de ma façon d’être, de discerner, d’agir, etc. C’est ce « fil rouge », comme nous aimons le dire, qui traverse mes actions. Pour moi, la prière devient de plus en plus un outil de la véritable JPIC que le monde attend. Que le Seigneur, Prince de la Paix, nous vienne en aide !